platon et l'art

La question est : comment se fait-il que les artistes aient un tel succès qui fait croire en leur compétence, alors qu’un peu de réflexion suffit pour leur dénier celle-ci ? Les éléments adventices qui n’apportent rien à la signification propre de l’œuvre « ne font pas partie du tout » (35) : ils nuisent à la belle unité de l’œuvre en lui donnant une allure composite. Leur beauté est liée à leur uniformité, c’est-à-dire à l’unité de leur forme, qui est de nature formelle ou idéale. Cela va de soi dans l’ordre de la production technique, au sens moderne du terme : elle est fondée sur la connaissance et sanctionnée par les résultats. Dans le Phèdre (245a), la poésie est mise au compte du troisième des quatre délires, à côté des délires prophétique, bacchique et érotique. Aristote donnera l’exemple du navigateur qui commande un gouvernail : il a besoin qu’il ne soit ni mou ni cassant, soit à la fois souple et résistant, et il revient au charpentier de savoir que le bois de cyprès correspond à ces exigences. Enfi… L’illusion qui fait le succès du poète est explicable : si son art « peut produire toute chose, c’est parce qu’il ne touche qu’un peu de chacune, à savoir son image (eïdôlon) » (République, X, 598b). [29] Chez Aristote, principe créateur de l'être, par lequel l'être trouve sa perfection en passant de la puissance à l'acte. 1/ Impossible de rendre compte de la beauté sensible sans la référer à l’unité ordonnée que l’idée confère à la matière. L’inattendu, c’est, par exemple, la rencontre d’Œdipe et de Laïos, et l’assassinat du second par le premier, lesquels viennent cependant s’inscrire dans la logique de l’accomplissement du destin implacable d’Œdipe annoncé par l’oracle, et réalisé à la fois malgré et par tous les efforts qui sont faits pour l’y soustraire. L’art, l’illusion et l’imitation chez Platon. ? Éros est « traversée du sensible » en ce sens qu'il ouvre un passage par le sensible pour finalement s’en émanciper. La, Aristote ne met pas en question la thèse selon laquelle la poésie est essentiellement une, Sur ce point, Aristote rejoint son maître, et loin de confondre la poésie avec la maîtrise des artifices métriques, il range ces derniers dans la catégorie des « assaisonnements (, Loin de dénoncer le caractère mimétique de la poésie, Aristote justifie l’imitation poétique comme quelque chose de naturel à l’homme : car l’homme est « le plus imitateur des animaux (, En outre, on peut rattacher le plaisir de l’imitation au plaisir de la connaissance, car l’image fait connaître. Pulchra dicuntur quae visa placent, écrira Thomas d’Aquin : on déclare belles les choses qu’il suffit de voir pour qu’elles plaisent. Sous des formes que nous avons sans doute des raisons de trouver excessives, il met par là en question l’idée – reçue pour nous, et toutefois récusée par plus d’un artiste – de l’indépendance ou de l’indifférence de la production artistique à l’égard non seulement du pouvoir politique, mais de toute exigence morale. La première étape consistera donc à chercher en quoi consiste la beauté sensible, soit l’objet propre de ce que nous appelons esthétique. Une telle conception reviendrait en fait à faire du plaisir le critère du beau, mais les Lois (II, 657c ss, et 667c ss) rappellent que c’est impossible : l’appréciation varierait constamment selon les individus et les âges. La tragédie au contraire doit se limiter à une histoire unique (ch.18, 1456a 10-18, p.56 – Texte 5). L’œuvre d’art acquiert ainsi une dimension philosophique que ne possède pas le récit historique[14]. La crise peut être comprise comme la rencontre de plusieurs éléments culturels virtuellement antagonistes : 1/ Un fonds culturel ancien essentiellement poétique : La fonction communément attribuée aux poètes était d’instruire. Plotin développe une théorie de la beauté sensible que Platon n’a jamais élaborée. C’est par un tel éclat que la bonne conduite peut devenir exemplaire. « L’art est une abstraction, c’est le moyen de monter vers Dieu en faisant comme notre divin Maître, créer » disait Paul Gauguin. L’un et l’autre reprennent et exploitent des thèmes platoniciens, dans un sens critique : ils corrigent ce qui dès l’Antiquité est apparu soit comme un excès, soit comme un manque, dans le platonisme. Dans sa Poétique Aristote ramène les différentes espèces de poésie, la plus grande partie de la musique et de la peinture au genre commun de la mimésis. Prenons un morceau d'airain, nous dit-il, certaines caractéristiques le différencient des autres métaux. Selon, D’un autre côté, il est rapide et facile de rejeter le platonisme du fait de sa proximité apparente avec un type d’idéologie apparu au XX, D’où certaines règles concernant cette unité, à commencer par celle de, L’épopée doit raconter un grand nombre d’histoires (, La tragédie au contraire doit se limiter à une histoire unique (ch.18, 1456a 10-18, p.56 – Texte 5). « De telle sorte [que] l'être qui se cache est illuminé. chez. L'œuvre d'art nous révèle donc que l’être ne se définit pas de façon univoque : il est à la fois un être en acte et un être en puissance, puissance au sens de potentialité. Mais on peut aussi remarquer qu’Aristote déjà caractérisait la comédie en disant qu’elle enlaidissait ses personnages pour qu’ils fassent rire. C’est dans la beauté de l’œuvre que réside tout le sens de celle-ci. Se référant à une « réalité véritable » il affirme, à l'inverse de Platon, que seul l'art est en mesure d'y avoir accès. « Le beau se trouve dans la grandeur et l'arrangement »[28] (50 b 37) dit le Stagirite, mais l’art ne se réduit pas à la perfection technique. L'entéléchie ainsi définie est, en quelle que sorte, la surimpression de la perfection sur elle-même. Mais si on ne connaît pas le modèle, l’image plaira encore par le « travail (apergasia) » qu’elle manifeste, « ou par sa couleur, ou par quelque autre cause de ce genre » (ibid., 18-19). Il devient à la fois une traversée du sensible et un instrument de réminiscence. 38-39, [13] Aristote, « La poétique », chap. L’art ne peut prétendre qu’à être décoratif, il doit être relégué au niveau du divertissement. Platon / Philosophe grec, -428 - -346 Retrouvez ici des citations de Platon venant de ses essais et pensées philosophiques. Et celle-ci est le domaine de l'art. Références : Ennéades, I, 6, et V, 8. Il s’agit de comparer un bloc de marbre brut et une statue de marbre (le Zeus de Phidias ou le Moïse de Michel-Ange) : l’art du sculpteur a donné au marbre une beauté qu’il n’avait pas à l’origine. Ce qui caractrérise une technè, c’est donc essentiellement la connaissance de la règle : c’est elle qui permet à l’homme de l’art de savoir pourquoi il fait ce qu’il fait. L'art. Le sculpteur qui réalise une statue, même s’il fait preuve d’une parfaite maîtrise technique, ne réalise pas nécessairement une œuvre d'art. L’imitation n’est pas nécessairement génératrice d’illusion, comme elle l’est de fait dans les forme littéraires ou picturales que Platon dénonce. Platon admet bien que la beauté est une valeur supérieure, mais elle ne peut l’être que moyennant une définition de la vraie beauté. Une beauté seulement formelle n’est qu’apparente ; la beauté véritable consiste bien plutôt dans l’adéquation entre la forme et le contenu – ce sera encore la définition kantienne et hégélienne du beau idéal. On pourrait assurément se demander si Plotin ne contredit pas ici sa critique du stoïcisme, qui defrait logiquement conduire à dire : si la statue est belle, le marbre qui est sa matière, et qui est en elle à ce titre comme une partie constituante, doit lui-même être beau. Par exemple, pour rappeler métaphoriquement la valeur d’Alexandre chef de ses soldats, l’artiste le fait plus grand. Éros est l’artisan qui unit ce qui était séparé, et de cette union naît un troisième terme : l’œuvre d’art qui synthétise et valorise. * Champs obligatoires. La réprobation platonicienne de l’art dramatique, notamment, a trouvé un prolongement historique dans l’excommunication des gens de théâtre, encore effective du temps de Molière. S’abandonner à cette expérience, c’est éprouver un sentiment esthétique. passer de la beauté corporelle à celle de l’âme, et produire des discours capables d’édifier spirituellement, en montrant ce qui est beau dans les occupations et les lois ; prendre conscience de la beauté inhérente à la connaissance, et multiplier les connaissance ; C’est pourquoi il est très difficile aux hommes de savoir maintenant ce que sont la justice et la sagesse : la, Le privilège qui fonde la fonction morale de la beauté – son, Le risque est alors que l’amour du beau se corrompe en amour du plaisir, si le plaisir de la beauté est confondu avec n’importe quelle autre jouissance. aimer un beau corps unique et produire de beaux discours à son propos ; reconnaître que la beauté de ce corps est identique à la beauté des autres, et se détacher d’une beauté seulement individuelle (la. Nous emprunteront à Aristote le terme « entéléchie » (ἐντελέχεια)[29] pour désigner le principe « néguentropique » de cette «bonification», principe qui permet à l'œuvre d’art de trouver son plein épanouissement, son plein sens par redoublement de l’accomplissement, de la poïésis. Au bout du compte, l’idée du bien –  le bien-en-soi, principe ultime de toute réalité – est identifiée à la beauté absolue : « sa beauté est au-dessus de toute expression, s’il produit la science et la vérité et s’il est encore plus beau qu’elles » (509a). Par extension, chose ou être qui permet à l'esprit ou au cœur de trouver son plein épanouissement. Le premier, dans une notation en marge de l’édition de la Poétique qu’il utilisait, écrit que la tragédie, « excitant la terreur et la pitié, purge et tempère ces sortes de passions. On pourrait penser que cette hiérarchisation des productions n’entraîne pas d’elle-même la dévaluation de l’art : celui-ci est dit avoir un certain rapport, indirect, à la vérité, par l’intermédiaire du produit artificiel qu’il imite. Platon voit dans l’art l’apparence, Aristote y voit l’apparaître. L’âme reconnaît dans le sensible la présence de ce qui est de même nature qu’elle : l’idée (I, 6, ch.2, 1-11). Platon accorde une grande importance à ces dernières : en accoutumant l’élève à l’abstraction et à la logique, elles sont une excellente préparation à la spéculation philosophique et permettent de sélectionner les « meilleures natures », qui seules accéderont à la métaphysique. Une production dépourvue de règles ne saurait être un art. Ces qualités sont les valeurs absolues que l’âme a pu contempler avant son existence corporelle.
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